lundi 26 janvier 2004

Essenine, écrivain "interdit" sous Staline, et aujourd'hui, dans notre monde libre, aussi difficile à trouver, car la traduction française, épuisée, n'est pas rééditée. Trouvé un volume de 19€ sur Chapitre.com, Les Quatre Dissidents : Blok, Essenine, Maïakovsky, Pasternak. Et c'est tout. Cela dit, en voulant commander Rupert Brook en anglais je n'ai pas eu davantage de succès. Epuisé, indisponible. Et après ça on va pleurnicher sur les éditions pirate d'Internet.

samedi 17 janvier 2004

Ce qu'il y a d'hilarant chez les Wahabites, Salafistes et autres pieux décérébrés nourris aux pétro-dollars, c'est qu'ils citent moins le Coran que la Sunna. La Sunna. Ils ne connaissent que ça. On a beau leur objecter n'importe quel verset, pas grave. La Sunna a dit. Si Muhammad revenait leur réciter le Coran, ils lui diraient pareil : Non, la Sunna.

dimanche 11 janvier 2004


"Hutte aux roseaux, 25 décembre 1939.

Il n'y a qu'une chose qui ne nous quitte jamais : la tonalité de la vie, qui demeure la même depuis la première prise de conscience, comme une mélodie qui revient sans cesse et dont les cadences résonnent encore, lorsque le bateau sombre."

"Héraclite a raison : nul ne traverse deux fois le même fleuve. Le mystère dans ces changements, c'est qu'ils répondent à nos propres transformations intérieures : c'est nous qui formons le monde; les événements de notre vie ne sont pas soumis au hasard. Les choses sont attirées et élues par notre être : le monde est ce que nous sommes. Chacun de nous est donc capable de le transformer : c'est l'immense pouvoir qui est accordé à l'homme. Et c'est pourquoi il importe tant que nous travaillions à notre propre formation."

"Au spectacle de lémures et de leurs fêtes funèbres, on aimerait lever l'ancre et gagner ces eaux claires et ces mondes d'étoiles fixes, dont l'étendue spirituelle se révèle à l'élu, par-delà les écueils et les défilés de la mort. Nous sentons que nous y avons notre patrie, et qu'ici nous sommes en exil."

"Mythologie. Le secret de l'Odyssée et de son influence, c'est qu'elle est une allégorie de la vie humaine. Elle est essentiellement animée par cette réalité primordiale qui se cache dans le symbole de Charybde et Scylla. L'homme sur lequel pèse la colère des dieux est placé entre deux dangers, dont chacun tend à surpasser l'autre en horreur. De même dans les batailles d'encerclement il se trouve pris entre la mort subie en combattant, et la mort en captivité. Il ne lui reste plus que l'étroit et redoutable passage qui se glisse entre les deux." 16/12/1942.


samedi 10 janvier 2004

Exposition à la grande Bibliothèque de quelques dessins préparatoires au film du seigneur des Agneaux. Le charme des esquisses fait comprendre pourquoi les décors sont si réussis. Il y a aussi de beaux coups de crayons.

lundi 5 janvier 2004


Sur l'éternelle question de savoir ce que les gens d'alors savaient :

"On évoqua aussi, une fois de plus, les tunnels à gaz où pénétrèrent des trains chargés de Juifs. Ce sont là des rumeurs, que je note en tant que telles ; mais des meurtres sur une grande échelle doivent sûrement se commettre."

Et ensuite, ces phrases serrées et denses de dégoût et de désespoir :

"Je songeai alors au brave potard de la rue Lapérouse et à sa femme pour qui il s'était tant inquiété, jadis. Quand on a connu des cas individuels et qu'on soupçonne le nombre des crimes qui s'accomplissent dans ces charniers, on découvre un tel excès de souffrance que le découragement vous saisit. Je suis alors pris de dégoût à la vue des uniformes, des épaulettes, des décorations, des armes, choses dont j'ai tant aimé l'éclat. La vieille chevalerie est morte. Les guerres d'aujourd'hui sont menées par des techniciens. Et l'homme est devenu cet homme annoncé depuis longtemps et que Dostoïevski décrit sous les traits de Raskolnikov. Il considère alors ses semblables comme de la vermine, ce dont précisément il doit se garder s'il ne veut pas devenir insecte lui-même. Pour lui, et pour ses victimes, entre en jeu, le vieux, l'incommensurable : "Ce que tu vois là, c'est toi-même."


dimanche 4 janvier 2004


"Mon caporal-cuisinier, qui marcha quelque temps à côté de moi, me raconta que son grand-père avait traversé ces villages en 1870, et son père en 1914 ; c'était maintenant son tour."

"Je remarquai aussi l'allure mécanique et irrésistible qui est propre aux catastrophes."



Kirchhorst, 26 août 1939.

A neuf heures du matin, tandis que j'étudiais paisiblement Hérodote dans mon lit, Louise m'apporta l'ordre de mobilisation qui me convoque pour le 30, à Celle : je l'accueillis sans trop de surprise, car de mois en mois et de semaine en semaine l'image de la guerre s'était dessinée plus nettement.

L'après-midi à Hanovre, où j'avais encore bien des dispositions et des emplettes à faire, par exemple à rapporter du camphre pour mes collections."


"Celle, 30 août 1939.

Départ. Je me regardai dans la glace, en uniforme de lieutenant, non sans ironie. Mais c'est sans doute en ce moment l'aventure de beaucoup d'autres hommes en Europe qui n'avaient jamais cru reprendre du service. En ce qui me concerne, j'attribue cette aventure pour une part à l'influence du Cancer, dans mon horoscope, qui m'a quelquefois replacé dans des situations antérieures, souvent pour mon profit."


samedi 3 janvier 2004



Balbastre, 1724-1799, ses pièces de clavecins, tout un programme dans les indications : La de Caze, la Boullonge : fièrement et marqué; la d'Héricourt : noblement, sans lenteur; la Suzanne : noblement et animé; la genty : gaïment; la Berville : gratieusement...

Les culs-de-plomb s'en sont d'ailleurs pris à balbastre, puisque ses noëls furent interdits de messe de minuit par l'achevêque de Paris, car "flattant l'oreille des fidèles au préjudice de Dieu".

D'où réflexions : il est donc toujours bien question d'oreille; et pourquoi Dieu aimerait qu'on joue faux ?

Dans la vie on prend toujours le mauvais chemin au bon moment. Dany Laferrière.