mardi 29 novembre 2005

Le Docteur Jivago


"Nous nous dirons encore l'un à l'autre nos paroles secrètes de la nuit, grandes et pacifiques comme le nom de l'océan d'Asie. Ce n'est pas un hasard si tu es là, au terme de ma vie, mon ange secret, mon ange interdit, sous un ciel de guerres et d'insurrections ; il y a bien longtemps, au commencement de ma vie, sous le ciel paisible de mon enfance, tu es apparue de la même manière. Cette nuit-là, dans ton uniforme marron de lycéenne, dans la pénombre, derrière la cloison de la chambre d'hôtel, tu étais absolument semblable à ce que tu es maintenant et tu avais la même étourdissante beauté."

"Nous, on dirait qu'on nous a appris à nous embrasser au ciel et qu'on nous a renvoyés sur terre, enfants, pour vivre en même temps, pour éprouver l'un sur l'autre notre amour. Une union parfaite, une couronne, sans côtés, sans degrés hauts ou bas, tout ayant même valeur, tout engendrant la joie, tout en nous se faisant âme. Mais dans cette tendresse sauvage qui à chaque instant pourrait nous dévorer, il y a quelque chose de puérilement rebelle, de "défendu". "

jeudi 24 novembre 2005

Le Docteur Jivago


"C'était un adolescent mince et élancé, un blanc-bec qui, comme une bougie d'anniversaire, brûlait pour les idéaux les plus sublimes."

"Trois années de changements, d'imprévu, de voyages ; la guerre, la révolution, tous leurs bouleversements, les fusillades, les scènes de ruine, les scènes de mort, les destructions, les incendies, tout cela se transforma en un vide dénué de sens. Après un long intermède, le prmeier événement d'importance, c'était cette course vertigineuse du train vers une maison encore intacte, dont la moindre pierre était précieuse. C'était la vie, c'était cela l'épreuve, c'était cela l'épreuve, c'était cela le but des chercheurs d'aventures, c'était cela le but final de l'art : retrouver les siens, rentrer chez soi, recommencer sa vie."

mercredi 23 novembre 2005

Sur le dos de la vie

l10h du matin. Comme à chaque fois avant de rencontrer quelqu''un qui semble en attendre beaucoup, refus et révolte, colère presque : "mais qu'attendez-vous de moi ? moi qui n'ai rien à donner...".

Comme le héros de Mysterious skin, j'ai un trou noir à la place du coeur.

19h. Bon allez fais pas ta mijaurée, de toute façon tu sais pas ce que tu peux donner, apporter, prendre, c'est le libre marché, les rencontres.

19h30. Et en plus il est en retard. Bien fait. C'est ce qui arrive toujours aux gens qui disent "je suis ponctuel". Jamais j'irai dire des conneries pareilles. Enfin bon, de la part de quelqu'un qui n'a pas arrêté de me seriner "nan mais je partirai à 21h au plus tard, hein..." Ouais ben si t'arrives à 220h45, bien la peine.

Bon j'envoie un SMS parce que j'adore râler dans mon bon droit (quand j'ai tort aussi).

19h35. Un mec déboule dans la salle. Il a un parka, des cheveux longs et gras, un portable en main et semble chercher des yeux quelqu'un. Oh non merde, pourvu que ça soit pas lui... il a l'air d'un raseur, putain j'aime pas ses yeux, il regarde vers moi, oh non avec sa tête à s'appeler Jean-Michel...

Non ça va, il se tire. ça doit pas être lui. D'ailleurs il a pas de lunettes. Bon qu'il arrive, avec une tête sympathique, et qu'on commence, quoi. Tiens prendre un kir en attendant. Pas de raison de patienter vu que je ne suis pas (toujours) patiente.

19h42. Bon ça y est le v'la, ouf il a l'air humain comme sur ses photos. Par contre pas baraqué du tout, ni joufflu. Quand je pense que son petit con de copain parle de lui comme d'un bûcheron. Là on dirait une grande gigue frêle. Queue de cheval et blouson de cuir, très intello parisien en final. quand je dis "bonjour" en ronchonnant il tombe en arrêt :"je m'attendais pas à cette voix fluette" s'étonne-t-il presque sur un ton de reproche. A sa mimique je comprends qu'il aurait pensé à un mix de voix à la Jeanne Moreau et de Claire Denis. "Ben non, et en plus j'ai un cheveu sur la langue." "Ah oui ? s'extasie-t-il hypocrite. C'est bien, ça !" D'façon lui aussi il a une voix fluette, que je dis. "Ah oui, moi j'ai une voix de merde ! approuve-t-il. Et comme je suis mal élevée, je me récrie pas.

Donc une fois assis, installé, il commence par me réciter son compliment, comme une petite fille qui tend des fleurs à un sous-préfet. "Je suis vachement content de te rencontrer et tout ça..." ce qui me fait rire : "attends d'arriver à la fin pour en être sûr." Et bon je lui raconte ma terreur que le glandu qui cherchait quelqu'un dans la salle soit lui, parce qu'il avait des cheveux longs et gras et ça le fait rire et il me dit que c'est pour ça qu'il porte une queue de cheval, c'est les jours où il a le cheveu gras. "Comme les femmes le hijeb, quoi", je dis (oui mes références sociologiques se situent toujours entre Berry et Poitou, comme on sait). Et après on discute coiffeurs et coiffures et on s'arrête et on se marre en se disant qu'on a l'air fin à discuter coiffure alors que c'est une rencontre historique merde. Du coup on change de sujet et pour relever le débat on parle du pliage des T shirts et comme on est vachement sages de ne jamais les repasser vu que ça se repasse tout seul sur le corps une fois enfilés.

Très intéressant, tout ça.

Mais bon à un moment on a dû faire une transition potable, d'autant plus qu'il m'avait fait un cadeau et que je n'en ai pas renversé mon kir sur son jean. Donc on a parlé d'amour et de mort, d'intuition et de tripes, de soufisme et de cul-bénis, d'Adso (le seul qui me parle franchement d'Adso tiens, d'habitude les autres évitent ce sujet come s'il s'agissait d'une maladie douloureuse à ne aps mentionner), de dandysme et de Balzac, il m'a raconté sa vie, et comment il a eu la chance d'avoir eu des parents communistes (et là j'approuve, c'est une aristocratie en soi), et de l'écriture et des écrivains, il n'arrête pas de bouger ses mains quand il parle, je me demande si j'en fais autant), et de la nuit du chasseur, et enfin de pleins de trucs sur lesquels on a été tellement intéressant et spirituel que naturellement je me souviens plus du détail de la conversation sur les coiffeurs et les tee-shirt froissés, puisque le temps a coulé tranquille comme il le devait et qu'à 21h je me suis dit "tiens il devrait partir" mais on n'avait à peine commencé à parler et à 21h30 je me suis dit "il exagère, il des cartons à emballer quoi" et puis à 21h40 il me demande si je veux aller bouffer quelque part... Malin, ça, on aurait pu commencer par là... Alors je lui dis qu'il l'est pas, malin, 1/ de se décider maintenant et 2/ de faire ça un soir de grève parce que j'ai un blanc dans les trains entre 23h et 12h et puis je me méfie et euh... 23h c'est bien comme train. Donc on reprend une bière (on en a bu pas mal, j'avais un peu mal au crâne le lendemain, mais c'est ça la guerre, il faut des désagréments) et on reparle, et on compare nos couleurs d'yeux qui sont les mêmes, et je lui dis "des yeux d'alien" et il se rengorge, et on va pisser parce que la bière quoi...

Et soudain il saute sur son siège en disant "et les tarots quoi !" Alors je sors mon jeu Visconti flamboyant d'or et mon Tarot de Milan tout usé et je lui demande ce qu'il veut savoir pour choisir le tirage et je me souviens plus ce qu'il demandait, on a tiré trois cartes chacun, j'ai lu mon tirage : X. Roue de Fortune - XV Diable - XXI Monde, et le sien : VII Chariot - VI Amoureux - XVI Maison-Dieu. Les deux ayant la Roue de Fortune en synthèse. Bah je voyais pas trop ce que ça voulait dire mais j'ai dit sans trop m'écouter ce qu'étaient les cartes et il approuvait vigoureusement comme s'il était d'accord, alors que moi j'étais dans le brouillard, surtout dans les vaps d'alcool, mais bon s'il a eu des réponses, et en plus des réponses à des questions, ça va.

et à 22h30 il suggère timidement qu'on va pas tarder et je lui dis qu'on décanille tout de suite même, mon train quoi.

Alors on est sorti et on s'est quitté devant le métro et il a eu presque un élan affectueux comme pour me tapoter dans le dos et j'aurais pu faire pareil avec 50 cm de plus.

Et puis même, à la fin, j'ai eu mon train. Et je me disais que c'est bien de m'être fait un pote et que ça me manquait. J'étais sur le dos de la vie, quoi.

On s'en fout

Johnny Depp se demande comment la France va se relever.

lundi 21 novembre 2005

Le Docteur Jivago


Relecture, encore et encore... enfin à intervalles qui se comptent en années, je me replonge dans ce bouquin, qui m'avait happée à seize ans. Je ne sais pas pourquoi ni en quoi, mais je me dis que ce livre m'a doucement influencé en je ne sais quoi, s'est imprimé d'une certaine façon, en creux :

"Impur, seul l'est le superflu. Lara était l'être le plus pur au monde."
éUn jour elle eut un rêve. Elle était sous terre, il ne restait plus d'elle que son flanc gauche jusqu'à l'épaule et la plante de son pied droit. Une touffe d'herbe sortait de son sein gauche, et sur la terre on chantauit "Les yeux noirs et les seins blancs" et "On défend à Macha d'aller à la rivière".

Roman-kaléidoscope. A chaque fois que je l'ai ouvert, j'y ai vu des éclats de joyaux s'en détacher, qui semblaient n'y pas être - ou du moins pas si visiblement - auparavant :

"Quelques instants plus tard, la rue était presque vide. La foule s'était dispersée dans les ruelles. La neige tombait moins dense. Le soir était sec comme un dessin au charbon. Soudain le soleil, qui se couchait là-bas, quelque part, derrière les maisons, apaprut à un tournant et se mit, aurait-on dit, à montrer du doigt tout ce qu'il y avait de rouge dans la rue : les bonnets à fond rouge des dragons, la toile du drapeau rouge abandonné, les filets et les points rouges des traces de sang qui s'allongeaient sur la neige."

Eclat de rire :

"C'était l'un de ces disciples de Léon Tolstoï dans la tête desquels les pensées d'un génie qui n'avait jamais connu la paix s'étaient couchées pour goûter un long repos sans nuages, et s'amenuisaient sans espoir."

Et bouleversant aussi, à en pleurer, ce court chapitre sur la "chute" de Lara :

"Un jour, d'ici de longues années, lorsqu'elle pourra, Lara racontera tout cela à Olia Diomina. Olia la prendra dans ses bras et se mettra à hurler.

Dehors les gouttes gazouillaient, le dégel bavardait à bâtons rompus. Quelqu'un, dans la rue, cognait à la porte des voisins. Lara ne levait pas la tête. Ses épaules tressaillaient. Elle pleurait."

dimanche 20 novembre 2005

Les Rois maudits


Vu le premier épisode, c'est déjà suffisant pour me faire une idée : nul à chier.

Et même c'est scandaleusement se foutre du monde. Trahir à ce point le roman et le Moyen-Âge, l'histoire et l'Histoire, c'est fort.

Déjà, première scène entre Molay et Philippe le Bel : le roi vindicatif, pétulant, affrontant directement et verbalement le Grand-Maître, ce qui est en contradiction totale et avec le livre et avec les récits des contemporains, qui décrivent tous Philippe IV comme taciturne, muet, voire glacé, comme disait l'évêque Bernard Saisset : "il ne sait que regarder fixement les gens sans parler, ce n'est ni un homme ni une bête, c'est une statue." Le Bel laissait aller ses ministres et agents d'Etat affronter les oppositions, lui se contentait d'assister muet au débat, et puis de trancher à la fin, à tel point que certains se sont demandés si ce" roi de fer" n'était pas un imbécile manipulé par ses ministres. En fait, Philippe le Bel ne se serait jamais commis à s'engueuler avec un Templier bientôt accusé d'hérésie, fut-il le Grand-Maître, il est le roi, c'est-à-dire la représentation incarnée de la majesté. Le Saint-Louis de Manneville, c'est lui. Son gisant (peut-être d'après un moulage mortuaire) c'est lui aussi. Quant à l'affrontement Templiers/Royauté il est mal compris. Jacques de Molay plaidant pour le peuple ! Mais les Templiers s'en foutent du peuple, Molay représente l'Ordre souverain face à cet Etat qui se constitue contre la féodalité. Plus tard on aura les Jésuites ou la Ligue contre le gallicanisme.

Autre chose qui choque, mis à part le physique, (T.Karyo est trop malingre. Philippe le Bel est grand, blond et athlétique, et connaissant les canons médiévaux, s'il fut appelé le Bel, c'est qu'il était blond ou à tout le moins très clair) la coiffure : cheveux ras, étrange, de même la boule à zéro de Marigny. Je sais pas, mais on a assez de statues et de miniatures du 14° siècle pour savoir qu'ils portaient cheveux mi-longs. Là Philippe le Bel a les cheveux courts, comme un vilain, comme un serf.

Autre scène vachement vraisemblable, l'arrestation des Templiers. Jacques de Molay, tous ses hommes, des moines soldats, entraînés à se battre et conditionnés pour mourir plutôt que de se rendre (parce qu'en Terre Sainte il n'était pas question d'abjurer pour avoir la vie sauve) regardent bouche bée les hommes du roi arrivés tranquillement et les arrêter, comme ça, sans se défendre, sans tirer l'épée, sans l'ombre d'une résistance. Je sais pas, il paraît bien mou celui qui a repris une dernière fois Saint-Jean d'Acre aux musulmans. Passons aussi sur ces prisonniers qui après sept ans de cachot et de sous-alimentation sortent de là les cheveux propres, avec toutes leurs dents, et blanches s'il vous plaît, alors que dans le roman ils sont justement présentés pour ce qu'ils doivent être : quatre vieillards brisés et en loques, édentés, boitant, les mains déformés par la torture...

Ensuite les décors : là on en a plein les yeux. On voit rien, c'est soit tout rouge, soit tout vert, on se croirait dans une boite de nuit avec des lampes de diverses couleurs, mais c'est à croire qu'au 14° siècle on n'avait pas encore inventé les fenêtres, et qu'on vivait dans des caves ou des bunkers (avec des lanternes de couleurs qui donnent une lumière digne du Lotus bleu ou de n'importe quel fumerie ou bordel de Cochinchine). De temps à autre, enfin pour faire transition entre deux scènes d'intérieur, on a une vue d'achitecture, presque toujours de nuit, une tour se découpant dans le ciel avec une grosse lune dorée : Hogwarts School. Donc si on veut avoir une idée de ce qu'était la lumière dans les intérieurs médiévaux, mieux vaut regarder Barry Lyndon, Louis enfant roi, La Vie de Molière, ça donne un meilleur aperçu, l'éclairage n'ayant pas trop changé entre le 14° et le 17-18° siècle. Idem pour les murs, dont on se sait pas s'ils sont faits de dalles de béton ou de fer boulonnés... Pas une tapisserie pour les couvrir ni une botte d'herbe au sol, je passe sur le design in du fauteuil de la reine d'Angleterre, avec ses léopards si chouettement stylisés...

Le personnage principal des Rois maudits, celui qu'on suit tout du long, c'est Robert d'Artois. Un géant roux, normalement. Du coup, Depardieu aurait mieux collé. On insiste sur son gigantisme, autant que sur celui de sa tante Mahaut. Les d'Artois sont des géants qui dépassent tout le monde, d'au moins une tête, dans les assemblées. Au lieu de ça on a Torreton, qui imite (mal) le jeu de Jean Piat et qui, quand il parle à Tolomei doit lever la tête pour le regarder dans les yeux. A part ça, hyper-fade dans le rôle. Mais le pire, c'est Tolomei justement. Le signor Tolomei ! Cet usurier lombard, ce marchand de Venise, qui est aussi le senhor Oliveira da Figueira dans Tintin au Pays de l'or noir ! Mielleux, cauteleux, rusé, Louis Seigner était parfait là-dedans. Ici on n'a retenu que l'accent italien, comme si c'était tout... On a aussi l'oeil toujours fermé, celui qui ne s'ouvre que "quand il dit la vérité, c'est dire si c'est rare"... Mais comme justement l'acteur ne laisse transparaître aucune ruse, aucune roublardise, on pense simplement qu'il est borgne, quoi.

Absence criante sinon : le peuple. Il est pas là. On a que des figurants muets et immobiles comme des potiches, qui regardent, par exemple, brûler les Templiers. Alors que la force du roman de Druon, c'était d'échapper à ce travers des romans historiques, qui est de ne pas présenter les gens de façon toute simple, réaliste, d'oublier que le Moyen-Âge, c'était aussi monsieur-tout-le-monde, et de le faire sentir, avec ces petites phrases qui tuent, ainsi au moment où l'on met le feu au bûcher, et où toute la foule bruissante et bavarde se tait soudain et alors, dans le silence, "un enfant éternua. Presque aussitôt, on entendit claquer le bruit d'une giffle." Dans ces Rois maudits-là, on n'éternue pas et on ne claque pas les moutards, mais la reine Isabelle se promène tout du long avec une couronne de carton doré sur le crâne (enfin vu le poids d'une couronne on espère pour elle qu'elle est en carton), à croire qu'elle ne l'enlève même pas au lit.

Bref, je mets cent fois au dessus Kingdom of Heaven, qui avec toutes ces erreurs (pas très graves, par ailleurs) avaient des images superbes et des acteurs qui jouaient pour de vrai, eux.


jeudi 17 novembre 2005

De la nécessité des étiquettes


"LE ROI
Pourquoi mets-tu des étiquettes sur tout, pour justifier tes sentiments ?

BECKET
Parce que, sans étiquettes, le monde n'aurait plus de forme, mon prince...

LE ROI
Et c'est important que le monde ait une forme ?

BECKET
Capital, mon prince, ou sinon on ne sait plus ce qu'on y fait."


samedi 12 novembre 2005

La loi juive, si sévère pour l'adultère, offre de curieux cas où pour sauver sa peau, un homme n'hésite pas à prostituer sa femme ou à livrer une concubine à un viol collectif. C'est le cas d'Abraham, qui par deux fois, une fois chez Pharaon une autre chez un roi de Palestine, se fait passer pour le frère de Sarah (alors qu'il n'est que son demi-frère et époux), par peur que la convoitise qu'elle va susciter ne lui coûte la vie. Par conséquent, Pharaon passe un agréable moment avec Sarah avant de découvrir la vérité (via une maladie malencontreuse, qui est en fait une punition divine pour l'adultère commis) et le roi paslestinien manque de faire pareil et tous deux de le reprocher ensuite à Abraham, qui récupère ainsi quelques cadeaux et compensations en dédommagement de "l'outrage" qu'on lui a fait.

Dans Juges, 19-20, un lévite a une concubine infidèle qui le plaque et retourne chez son père. Il va la rechercher, se réconcilie , refait avec elle le voyage du retour pour la ramener au foyer conjugal. Chez un certain Ephraïm, une troupe de vauriens les attaque et veut faire au lévite ce que les sodomites souhaitaient faire aux anges chez Lot. Comme Lot, Ephraïm leur propose sa fille vierge plutôt que de laisser maltraiter un hôte (ce qui est envisageable dans le code d'honneur de l'hospitalité). Mais le lévite trouve une meilleure solution : il sort, leur refile sa concubine (à laquelle il semblait pourtant tenir) et celle-ci se fait violer toute la nuit jusqu'à en mourir. Alors le lévite ramasse le corps, le coupe en douze morceaux et envoie les bouts aux douze tribus pour appeler à la vengeance, s'ensuit donc une guerre logique contre les fils de Benjamin dans une vendetta conventionnelle des tribus.

N'empêche que dans ce monde méditerranéen si chatouilleux sur l'honneur des femmes, se sortir d'une mauvaise passe en prostituant sa femme a quelque chose de curieux. Je me demande s'il n'y a pas là une survivance archaïque de je ne sais quel qanun tribal ou villageois.

vendredi 11 novembre 2005

Mot


"Je crois en la puissance des mots. Telle est ma chimère. J'imagine qu'avec mes mots, mes pauvres mots, je vais bouleverser les coeurs, modifier le destin, transfigurer le cosmos. Telle est mon utopie. Je me prends pour Dieu."

jeudi 10 novembre 2005

Militantisme


"Une nuit, au Crazy Horse. Quand Alain bernardin, présentant chacune de ses belles danseuses nues, observa qu'Alexa Polskaschnikoff était de nationalité polonaise, ce fut un tonnerre d'applaudissements. Il est vraiment réconfortant de noter que, même en ces heures tardives, le courage politique des noctambules ne faiblit pas, et que leur vigilance militante est sans cesse aux aguets. la Pologne peut dormir tranquille : le Tout-Paris veille."
Le taureau de Phalaris: Dictionnaire philosophique

Mort


"Je songe souvent à cet évêque bulgare (pas un évêque en complet veston, mais un grand seigneur à l'ancienne mode, un prince de l'Eglise) qui, interrogé par Dimitri Ermoloff sur l'au-delà, lui avait répondu en lissant sa barbe qu'il avait fort majestueuse : "Assurément, il y a quelque chose après la mort... mais, hum... on exagère beaucoup."

"Le Christ parle volontiers des méchants, mais il ne dit rien des crétins."

"Ce qui importe, ce ne sont pas les étiquettes unanimes, ce sont les visages.


Départ


"On offrirait aux gens qui se donnent la mort, juste avant qu'ils ne commettent l'acte irrémédiable, un billet d'avion pour partir se reposer dans une île du Pacifique, la plupart d'entre eux choisiraient le billet d'avion. Ce que désirent les suicidaires, ce n'est pas mourir, c'est que la situation où ils se trouvent se modifie, revête une autre forme."

"Les discours sur le langage, sur l'échange, sur la communion, m'exaspèrent. La vérité, c'est l'indifférence des êtres pour les êtres. Les gens se passent admirablement de nous, de nos livres, de notre visage et de notre voix. Nous vivons seuls, et un jour nous mourrons seuls. Enfin, ce sera le silence."


mercredi 9 novembre 2005

Avenir


"Un esprit libre a toujours un pied dans le camp d'en face."


Eros et christianisme

L'amour antique a disparu dans le christianisme. C'est un amour écouillé, philia, agapê, mais pas Eros, qui a trouvé heureusement asile en Islam.
Si Matzneff demande à la philosophie d'être une école de bonheur, d'hédonisme, moi j'attends d'elle qu'elle soit une école d'action, une morale d'action. En cela, Jankélévitch me parle plus que les épicuriens ou les stoïciens, lesquels chacun à leur manière, enseignent à ne pas souffrir ou à moins souffrir. Moi, il me faut une règle du comment-agir. Et sans dogme, s'il vous plaît. Car rien n'atrophie plus le sens moral qu'un dogme, qu'il soit religieux ou politique.

Ma haine du dogme. Non, une répulsion, un recul instinctif, comme devant l'emmerdeur grossier qui vous parle de trop près et vous inflige sa mauvaise haleine, tellement il est pressé de vous convaincre. Dès qu'on met une majuscule à un nom commun, avec gri-gri, encens, livre sacré, eau bénite, il faut se méfier. L'incantation n'est jamais qu'une forme de trouille.

Etiquettes


"Les anarchistes ont des idées de gauche et un tempérament de droite, au lieu que les fascistes ont des idées de droite et un tempérament de gauche.
L'anarchisme est aristocratique, et le fascisme plébéïen.
L'anarchiste, qui ne croit qu'en sa propre destinée, est byronien ; le fasciste, qui révère l'Etat, est hégélien.
L'anarchiste boit du vin de Bourgogne et mange des truffes ; le fasciste boit de la bière et mange de la choucroute.
L'anarchiste soigne sa ligne et pèse à cinquante ans le même poids que le jour où il a passé le conseil de révision ; le fasciste, au-delà de trente ans, prend du bide.
Le fasciste aspire au pouvoir et l'anarchiste au sublime.
Il y a du bourgeois dans le fasciste ; dans l'anarchiste, du dandy. Et du stoïcien."


jeudi 3 novembre 2005

Morsure bleutée crocs froids du loup
sur la nuque
Le point rouge de ta cigarette et l'angoisse en moi petit point rouge aussi
comme un coeur épris palpite
On ne choisit pas son enfer

Nuit lucide
dans le noir, les yeux des veilleurs étincellent
Tu veilles aussi sans doute
Nous sommes deux exilés sur la peau de la nostalgie
Insomniaques guettant le point du jour
Mais chez nous c'est la vie qui jamais ne dort.

Dans la vie on prend toujours le mauvais chemin au bon moment. Dany Laferrière.