lundi 27 décembre 2010

"Les vagabonds de l'écriture sainte ne grandissent pas avec des mains lisses"



"L'Écriture sainte parle des vagabonds. C'est la carte de visite des touchés  par la voix de Dieu. Abraham écoute "Lekh lekhà" de Yod,, "va, va-t-en", début de trajets et de dépaysements sans fin.
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De la souche de David, Jésus, de Nazareth et de Bethléem, deviendra menuisier, il devra épaissir ses paumes dans un métier de force et de précision. Les vagabonds de l'écriture sainte ne grandissent pas avec des mains lisses. Avec leurs doigts, ils savent traire, raboter, jouer de la musique et blesser, prendre par la peau du cou les marchands dans un temple, guérir des blessures. Les mains crucifiées étaient calleuses."

Jacob Steinhardt


Dans le même livre, une remarque subtile sur la bouderie de Jonas, ce passage qui m'a déjà enchantée : Jonas, celui qui ne répond pas à Dieu. Pas même pour dire non.

"A. : Tu n'es pas accusé de colère contre la clémence de Yod. Souviens-toi : tu as exprimé la volonté de mourir et Yod t'a demandé : "Fais-tu bien de t'enflammer ?" Est-ce bien ça ?
I. : C'est vrai.
A. : Tu es accusé de ne pas avoir répondu. Tu es accusé d'être le premier au monde à s'être tu à une question de Yod, se refusant à lui. L'humanité entière s'est adressé au ciel par des implorations, des questions, des blasphèmes, et souvent elle n'a pas obtenu le plus petit signe d'accueil, celui d'avoir été, sinon exaucée, du moins écoutée. Personne avant toi n'avait inversé les rôles en se taisant face au ciel. Je vois que tu ne t'es même pas aperçu de ton refus."

D'ailleurs, comme je le mentionnais aussi, "le dialogue se conclut sur les dernières paroles de Dieu, qui lui démontre sans doute son tort, Jonas se tait. Boude-t-il toujours ? On n'en sait rien. En tout cas il ne reconnaît pas explicitement ses torts. Pour toute réponse, son silence : –...".

"Être mal compris par le ciel, je te le dis à toi qui me scrutes dans l'obscurité, c'est le dernier des exils pour un homme."

Comme une langue au palais, Erri de Luca, trad. Danièle Valin. 

Dans la vie on prend toujours le mauvais chemin au bon moment. Dany Laferrière.